Sur la table à vos pieds, cette tortue d'ivoire
Qui chemine immobile, lève une tête lourde, et tente
D'observer, de sous sa carapace dure et blanche et suave
À la main qui caresse, le jour dehors qui glisse de côté,
L'allongement des ombres par la fenêtre grise, les pages
Couvertes de ratures.
Le temps s'enfuit; la vie s'écoule
Et la mort passe ayant déjà choisi les siens.
Quel nom
Lorsque l'aurore éclaire
Londres, nos lèvres dans le psaume
Ont trois fois murmuré?
Car il nous fait concevoir la montagne,
Sous la neige et dit notre pitié. Ô vous,
Aux douces mains, plus douces que l'ivoire,
Ayez pitié de la tortue aux pattes lourdes sur la table
Où la page s'ajoute à l'autre page, aridement;
Dans les immensités de l'ombre, ayez pitié de celui qui vous
chante
Une hymne maladroite avec de pauvres mots :
Sans doute le langage est blessé, les images
Sont pauvres, mais comme la tortue, plus chétif et plus lent,
N'ayant pas même de l'ivoire la douceur,
Il lève ses mains vides, ses yeux insatisfaits,
N'osant pas même regarder le grand papier désert. Ô jeune fille au blond matin que salue l'Ange,
Sans une grâce que vos mains nous ont value,
Que pourrait-il écrire celui qui peine, sur la page?
Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012