Le fleuve vert, le temps, l'idée, il faut que tout nous
quitte Qui sommes-nous qui ne savons garder Le goût qu'avait le temps trop vite en fuite, L'image bleue, les pleurs de l'arbre après la pluie
Même le souvenir est étroit dans sa cage
Il ouvre au ciel une serrure,
Foudroie la main qui voudrait l'arrêter
Quand la mémoire, oiseau têtu, déclare : je vous
ignore
Jour de neige, une silhouette penchée, seule — Quel frère à nous semblable par la douleur? Courbe son dos et gagne un pré de lune L'arbre chétif et noir lorsque
l'année s'achève
La bouche est vide. La langue exploite un rien de sa
carrière Où sont les mots d'antan, les phrases quand tu dors? Où est la langue peuplée d'îles, d'images au réveil? Tu ignores qui t'habite et te délie
Si le temps était un cheval, tu saurais l'implorer De la main, au plat de l'encolure, sous la crinière Son oeil cesserait de craindre l'inconnu Qui parle de prairies célestes
quand tout divague
Le temps nous brûle. L'eau s'agite en nos coeurs L'oiseau de cendre abrite sa couvée. Quel amour? Ton foie nourrit de sa substance le rapace. Le bruit de ton angoisse fait rire
l'ennemi.
Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012