Poèmes

Le Renard, le Singe et les Animaux

par Jules Laforgue

Jules Laforgue

Les
Animaux, au décès d'un
Lion,
En son vivant prince de la contrée,
Pour faire un roi s'assemblèrent, dit-on.
De son étui la couronne est tirée :
Dans une chartre un dragon la gardoit.
Il se trouva que, sur tous essayée,
A pas un d'eux elle ne convenoit :
Plusieurs avoient la tête trop menue,
Aucuns trop grosse, aucuns même cornue.
Le
Singe aussi fit l'épreuve en riant;
Et par plaisir la tiare essayant.
Il fit autour force grimaceries,
Tours de souplesse, et mille singeries,
Passa dedans ainsi qu'en un cerceau.
Aux
Animaux cela sembla si beau,
Qu'il fut élu : chacun lui fit hommage.
Le
Renard seul regretta son suffrage.
Sans toutefois montrer son sentiment.
Quand il eut fait son petit compliment,
Il dit au
Roi : «
Je sais,
Sire, une cache,
Et ne crois pas qu'autre que moi la sache.
Or tout trésor, par droit de royauté.
Appartient,
Sire, à
Votre
Majesté. »
Le nouveau roi bâille après la finance;
Lui-même y court pour n'être pas trompé.
C'étoit un piège : il y fut attrapé.
Le
Renard dit, au nom de l'assistance : «
Prétendrois-tu nous gouverner encor.

Ne sachant pas te conduire toi-même?
Il fut démis; et l'on tomba d'accord
Qu'à peu de gens convient le diadème.



Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012

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