Poèmes

Le Christ mort

par Argenty Jean

Avant de lire ce qui suit ouvre dans une fenêtre d'un navigateur libre ce tableau du Christ: « La déploration du Christ Mort » d'Andrea Mantegna. Tu le contempleras tout en lisant le texte que voici:

Voilà bien de la peine à inspirer cette légèreté
c'est un appel d'air et de combustible
Appel à jamais plombé par une densité du monde devenu soudain immense
au point de n'être plus inspirable
par le nu enfoncé dans la désolation

La mort est un enfoncement
Ce corps est lourd et vide tant que les chairs concentrées
empèsent le sens même de la courbe du temps
lequel, épuisé de cette distorsion, s'extirpe hors de ce qui le torture

Les limites du corps s'effacent
Il semble passer dans la pierre
N'être plus aussi distinct de l'univers qu'avec la vie dans ses tissus
Il se solidifie pendant qu'il se dissout
Paradoxe subtil que la pâleur et le froid exhibent

Le mort rend aux êtres aimés aimants
le double de ce qu'il a donné
lorsque encore vivant son être se mouvait des humeurs affectives

L'âme est une énergie psychique qui ne s'épuisera qu'avec la mort ultime de la psyché humaine
Elle est transmise à ceux qui pleurent le disparu
s'émeuvent du touché de la part d'âme reçue

Rare l'âme si noire que nul à son chevet ne dispense une larme
Rare mais il est arrivé que l'humanité doute de la mort d'un homme
quand de sa vie l'œuvre de celui-ci fût de supplicier dans l'humain l'extrémité cosmique.

La douleur morale brise ton front, Christ, qui ne pouvait savoir
qu'en trouant tes chairs par ces points se répandait en vain
ta trop grande âme au supplice condamnée

On ne pleure pas tant le supplicié
la souffrance infligée s'en va noircir son âme
Plaint alors cette âme assombrie, diminuée
ce corps démantelé qui crie dans ses plaies bien après le dernier soupir

Magiquement, diraient les fous, tu avais déjà distribué ton âme immense
tu n'avais d'autre psyché que l'Autre, divin prestidigitateur
Les hommes te pleuraient bien avant le dernier soupir
bien avant ta première inspiration
Le temps sur Toi n'a pas de prise
Alors l'Autre en Toi est entré dans ta chair pour ta résurrection

Voila bien cette ré-tension et tes pieds, Christ, curieusement lévitent

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