Ô, dans les grondements des lointaines falaises
Là-bas, dans l’échancrure chatoyante du temps
Se tressent ensemble des énergies telluriques aux allures de marteau
Sens-tu, ami, la présence poignante de monstres équidés
Moins oubliés de la mort que des cadres actifs
Moins oubliés des corps désolés que des courtiers sans corps
Soulevant de leurs croupes massives le poids des millénaires
Ils sortiront des trottoirs damés de millions de pas
Avec de la sueur blanche écumante dans les plis de leur robe
Entends-tu depuis leurs naseaux ventiler des siècles de silence
La rumeur de leurs poitrails repoussant les limites des vitraux
Ils font tant de vapeurs que les machines s’arrêtent
Tant de vapeurs que les couleurs se fanent dans les devantures
Perçois-tu l’évidence d’un surgissement de la montagne
Là, au milieu de la ville mourante
C’est que jadis il fût ici une telle montagne
Axe du monde
Dire à propos de cet axe qu’il avait du monde une idée simple
Comme à sa table de travail est simple la mère qui reprise
Elle a au doigt un dé de métal et ne se pique que par mégarde
Distraite parfois que ça tintinnabule dans un recoin perdu de l’attente
Une idée simple de mouvement dans l’infini
Une idée simple et sérieuse d’un présent sans questions
Oui, il s’agissait sans doute d’un autre temps, un temps jadis comme on dit
Pour qualifier de l’avoir été qui devient légende
Un temps qui accouchait d’une montagne aux reflets roses
Aux mamelles de laquelle tétaient des lions rugissants