Poèmes

La Stèle

par Jean Balde

Jean Balde

A Mademoiselle G. B...

Quand Celle qu'il aimait mourut dans un sourire,
Blanche parmi les fleurs sur son lit nuptial,
Il resta sans un mot, stupéfié, bestial,
Et regarda pleurer les longs cierges de cire.

Mais quand il entendit, sur ce corps svelte et beau,
Retomber le couvercle étouffant de la bière,
Un regard effrayant courut sous sa paupière.
Puis il se mit, tout seul, à sculpter un tombeau.

Il creusait nuit et jour le marbre de la stèle
Et sa face riait, quand il avait tordu
D'impuissante douleur un beau torse, ou
Les muscles convulsés de quelque bras rebelle.

Mais insensiblement son regard s'adoucit.
Les formes s'affinaient chaque jour, les figures
Se faisaient lentement plus calmes, puis très pures,
Et les femmes pleuraient plus noblement ainsi.

Il sculptait... maintenant, sur l'œuvre immaculée,
Ses mains ne se posaient qu'avec un soin pieux
Et d'ardentes clartés montèrent dans
Lorsqu'il ceignit de fleurs le front du mausolée.

Et quand tout fut fini, quand il le vit si beau,
Dans tout son sang frémit une sublime ivresse
Et son être éclata d'orgueil et d'allégresse.
Il avait oublié que c'était un tombeau.

Extrait de: 
Âmes d'Artistes, (1908)



Poème publié et mis à jour le: 14 February 2023

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