Pourquoi donc pleures-tu dans le soir comme un lâche
Tout le jour, obsédé par l'impossible tâche,
Tu souffris, tu pressas ton être frémissant
Pour en faire jaillir quelque sublime accent.
Ne pleure pas... Quel jour a tenu sa promesse
Quel soir a couronné les aubes d'allégresse
Et qui donc nous dira, pauvre enfant, si la nuit
Aime le geste fier des mains lourdes de fruit !
Qui, qui donc nous dira que ce beau soir limpide
A maudit le pêcheur traînant son filet vide,
L'ouvrier dont le pic s'est brisé dans les mains !
Puisque tu n'as pas bu les vils baisers humains,
Puisque ton front meurtri n'a pas cherché d'épaule,
Regarde... la paix vient ; sous le vent qui les frôle,
Les arbres affaissés rouvrent un peu leurs bras
Pour recevoir la nuit sur leurs feuillages las.
Elle vient, bénissant enfin la route aride,
Le pré flétri, l'eau trouble et l'épi presque vide,
Ce sol stérile et dur brûlé par le soleil
Qui mérite pourtant la grâce du sommeil.
Entends... l'ombre s'emplit de voix, de plaintes sourdes,
Des pleurs gouttent sans fin et les douleurs trop lourdes
Se détachent du cœur incliné, comme un fruit
Tombe avec un bruit mat et roule dans la nuit.
Poème publié et mis à jour le: 14 February 2023