Poèmes

La Meule

par Max Jacob

Max Jacob

Tourne ta meule, rémouleur !

Voilà qu'elle grandit

le sabre que tu polis, rémouleur, devient un nuage ou la faulx

la faulx ! la faulx gigantesque de la mort.

La meule devient la
Terre !
La
Terre gigantesque de la vie

la vie gigantesque sous le ciel.

Tourne ta meule, rémouleur !

les étincelles sortent dans une direction ou l'autre !

les étincelles de la vie, les étincelles de la mort.
Je vis les étincelles, c'était des corps humains,

des fragments de la vie, des fragments de la mort :

des crânes, des membres mêlés à des arbres

mêlés à des collines, mêlés à des pierres

à des monuments, à des fragments des monuments

de la vie, des monuments de la mort.

Et parmi les étincelles je vis

le
Corps
Sublime du
Seigneur
Dieu
Christ,

tout arraché, saignant, blême, percé, écorché.

Mais dans le tourbillon qui sortait de la meule

le
Corps
Sublime du
Seigneur
Dieu
Christ

tout arraché, le
Corps

résista au courant et je vis

tout le courant des étincelles

ramené à ce
Corps
Sublime du
Seigneur

et une grande lumière entoura

la meule, la faulx, la faulx gigantesque de la
Mort.



Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012

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