Poèmes

Sonnet V

par Jean de Sponde

Je meurs, et les soucis qui sortent du martyre

Que me donne l'absence, et les jours et les nuicts
Font tant, qu'à tous moments je ne sçay que je suis,
Si j'empire du tout ou bien si je respire.

Un chagrin survenant mille chagrins m'attire,
Et me cuydant aider moy-mesme je me nuis ;
L'infini mouvement de mes roulans ennuis
M'emporte, et je le sens, mais je ne le puis dire.

Je suis cet
Acteon de ses chiens deschiré !
Si l'esclat de mon ame est si bien altéré
Qu'elle, qui me devrait faire vivre, me tuë :

Deux
Déesses nous ont tramé tout nostre sort,

Mais pour divers sujets nous trouvons mesme mort,
Moy de ne la point voir, et luy de l'avoir veuë.



Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012

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