Alors je leur ai dit :
La nuée au-dessus de l'arche, moi je ne l'ai jamais vue
Et traîner cette boîte vide à présent ça suffit.
Retranchez-moi si vous voulez, en tout cas moi je me
retranche —
De vos fêtes, de vos émeutes quand les sauterelles
Se font rares ou l'eau saumâtre, et de l'apostasie
Aussi de bœuf en bœuf qui vous roule dans la poussière
Mais l'œil toujours en coin vers la base de la montagne
Où le
Vieux cornu resurgit pour casser de l'ardoise
Et cracher la fumée d'orage par les oreilles.
Malheur, je leur ai dit,
Que le fil des roseaux d'Egypte n'ait pas tranché
Ses petits poings serrés sur une âme déjà remuante,
Et l'éternité plate du fleuve englouti
La première marche du temps rouvert par la
Promesse.
Mais moi souvent parmi les froissements innombrables du
songe,
Ecoutant glisser la robe d'une princesse vers les lotus,
J'ai détourné ces pas qui déjà foulaient la pente de
l'exode :
La noire extermination, les signes sanglants sur les
portes,
La tranchée dans la mer comme un coup de vent par les
blés.
Qu'est-ce que c'est que cette patrie, au-delà des cailloux,
Dont vous ne goûterez pas l'herbe, et quel autre
Canaan que la mort ?
Qui nous a séparés
Du sombre
Nil d'oubli dont on ne connaît pas les
sources ?
Voilà ce que j'ai dit.
Ils se regardent maintenant, pour savoir qui jettera la
première pierre.
J'ai pitié d'eux, pitié du berger solitaire qui les pousse
Comme son ombre à travers ce néant de sable et de
siècles.
J'ai pitié mais j'ai peur aussi, je voudrais être ailleurs de
toutes mes forces.
Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012