Poèmes

Le Loup et le Chien Maigre

par Jules Laforgue

Jules Laforgue

Autrefois
Carpillon fretin

Eut beau prêcher, il eut beau dire,

On le mit dans la poêle à frire.
Je fis voir que lâcher ce qu'on a dans la main.

Sous espoir de grosse aventure,

Est imprudence toute pure.
Le
Pêcheur eut raison;
Carpillon n'eut pas tort :
Chacun dit ce qu'il peut pour défendre sa vie.

Maintenant il faut que j'appuie
Ce que j'avançai lors, de quelque trait encor.

Certain
Loup, aussi sot que le
Pêcheur fut sage.

Trouvant un
Chien hors du village.
S'en alloit l'emporter.
Le
Chien représenta
Sa maigreur : «
Jà ne plaise à votre
Seigneurie

De me prendre en cet état-là;

Attendez : mon maître marie

Sa fille unique, et vous jugez
Qu'étant de noce, il faut, malgré moi, que j'engraisse. »

Le
Loup le croit, le
Loup le laisse.

Le
Loup, quelques jours écoulés.
Revient voir si son
Chien n'est point meilleur à prendre;

Mais le drôle étoit au logis.

Il dit au
Loup par un treillis : «
Ami, je vais sortir; et, si tu veux attendre.

Le portier du logis et moi

Nous serons tout à l'heure à toi. »
Ce portier du logis étoit un chien énorme.

Expédiant les loups en forme.

Celui-ci s'en douta. «
Serviteur au portier »,
Dit-il; et de courir.
Il étoit fort agile;
Mais il n'étoit pas fort habile :
Ce
Loup ne sa voit pas encor bien son métier.



Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012

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