J'écris de ce lieu-ci — parole en retrait des parages où ce que d'autres voient ranime leur souffle et les maintient en vie ; inapte à l'émancipation, j'entrevois ;
questionneur mal élevé je rôde autour des œuvres, accablé de fuites, et parvenant rarement ù saisir de dos fugitives dans le coup d'aile de leur passage les
présences. J'écris de ce lieu-ci, presque aveugle. Parfois un voyant me conduit jusqu'au gué.
L'écrivain, il se retourne soudain comme l'enfant au jeu de « l'Horloge » ; son cri à l'impro-viste fige le désordre ; il prend au (premier) mot un concert de murmures
— puis rusé il se retourne vers le mur, faussement onirique : certains proposent en méthode de favoriser le demi-sommeil, abaissant le seuil lucide qui fait barrage jusqu'à
la subconscience, afin que, souverain sournois soudain laborieux et effréné, il fasse ainsi main basse sur l'aubaine de joyaux que cache l'âme comme elle respire, fille du conte
qui ne pouvait ouvrir la bouche sans émettre des gemmes — et s'empare du bric-à-brac de la psyché antiquaire. Mais si le trésor était ce qui surmonte le barrage
même de l'éveil, ce qui a passé l'épreuve du jour, et se tient merveilleux parmi nous, les yeux ouverts d'en être revenu comme un homme qui témoigne du
séisme, capable ainsi de secourir, infusant son habileté à notre histoire, haussant d'un lumen notre journée ?
Le geste d'écrire provoque la dictée ; avant même il se met à l'entente continuée d'une dictée dont le premier mot ne fut jamais prononcé assez bas pour ne
pas recouvrir d'un grand bruit tout le reste. Prenant en main cette situation insupportable, l'écrivain traque la séquence assourdie ; il extorque un aveu à la confusion ; il se
substitue à la Pythie analphabète.
Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012