J'ai vu, alors que tu racontais l'histoire d'une vie
J'ai vu, Sophie
La femme debout devant des rectangles ocres et jaunes
Qui dansaient, les rectangles
Et toi, surprise, qui dansait aussi
Devant le lit vide du fils mené à bien
J'ai vu ce qui descend dans les veines de la mère
Devant les rectangles nus de l'enfant
Cet abandon des linges au bout des mains
Des caresses qui pleurent fièrement la réussite
Et cette montagne toute droite est blanche là-haut
J'ai vu, Sophie amie, l'excellence de ton pardon
Appuyer des baisers sur les petites choses
Toutes si perdues, si seules de n'être plus vues
Et j'ai senti comme tes pas portaient d'avenir
Et j'ai senti la permanence indubitable de la joie
J'ai vu la fenêtre s'ouvrir devant les allées de sourires
Devant les azalées ouvertes des destins croisés
Les rivières si fraîches semées de copeaux de moi
Triste ménestrel assis devant sa machine à rêver
J'ai vu les framboises et la frimousse et les yeux
J'ai vu les dents de ton enfant sur son rire et le vent
Largement émerveillé de tant de décence
J'allais, battant pavillon norvégien
Graver des signes sur la glace