I
Sans feu ni lieu le roc
Maison trouée je tire sur les lampes
Le cœur non atteint se défend
Je veux saisir la pieuvre
Elle aussi se défend
Je descends plus profond dans la forêt des algues où toute vie s'obstrue où le silence d'eau dit adieu à l'hiver où je suis comme une ancre immobile et le fer me glace
avec la nuit
Je lis et chaque page fait monter une bulle qui crève à petit bruit
C'est la voix qui dit non
Ma vie perdue qui saigne au milieu des débris guettés par les poissons
II
Hôtel aveugle
Un cri
Dans la nuit calme on tue
Une étoile a souri
Mais moi je suis le lierre immobile et mon double bouge à peine
Mais qui ?
Qui a poussé un cri ?
Qui a vendu l'hôtel ?
Qui a trompé la nuit ?
Qui veut toujours écrire contre le grand oubli contre la page morte ?
Devant l'étoile assise à la porte et le corps de l'ivrogne endormi
III
Ces grands yeux qui me fixent
Cette voix qui reparle
Où est
Dieu dans les algues
Je descends une à une
les marches du château
Je perds mes mots
Je suis
médusé
Un nuage
s'avance et moi je reste
cloué par cette absence
Attaque-moi nuage
Mais le nuage passe
Et la nuit recommence
à briller dans la nuit
Toute étoile à se taire
On veut me rendre fou
par le bruit de la mer
Je ferme la fenêtre
et la rumeur renaît
plus forte plus légère
Je me fais des reproches
Je vois ma vie entière
comme une île qui tombe
à l'envers dans les eaux
Je ne peux pas trouver
le repos et je fume
Je sens bien que déjà
on s'attaque à mes os
Tous les matins cette heure comme une rose grise et le temps qui dégoutte
On y buvait l'instant et puis on s'arrêtait
On soulevait le verre
La mort était dedans
Très douce on aurait dit comme la ville au soir où tout brille où tout pleure avec un corbillard minuscule et fleuri
Et un trou dans le ciel comme la plaie au front d'un géant noir et bon
Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012