Poèmes

Aménites sur mon Seuil

par Paul Morin

Paul Morin

On frappe.
Qui est-ce ?
Ah !... geignarde parasite,

J'avais pourtant prié les dieux
De m'épargner ta longue et sinistre visite,

Et l'amertume des adieux.

J'ai rêvé d'une mort foudroyante et splendide,

Telle que tu n'apportes pas ;
Vers le gouffre indulgent je ne veux d'autre guide

Que le plus brusque des trépas.

Que viens-tu faire ici, sournoise ?
Attendre l'heure

Où s'inclineront sous ta loi
Mes désirs assagis ?
Sauras-tu si je pleure

De honte, de joie ou d'effroi ?

Soudainement me faut-il rompre pour te plaire

L'ordonnance de mes pensées,
Et ne chanter mon beau royaume imaginaire .
Qu'en strophes rudes et pressées ?

Mon corps et mon orgueil se moquent du présage

Que burine l'arc de ton dos...
Et ce masque de peur, est-ce ton vrai visage ?


Mais non.
C'est mon premier cadeau.

D'autres suivront : les yeux qui ne peuvent plus lire ;
Les doigts rebelles au clavier ;


Tais-toi ! —
La solitude, où le cœur se déchire

À chaque meuble familier ;

Les souvenirs tapis partout : dans une robe,

Un lit, une lettre, un parfum ;
La pitoyable chair, qui flambe, et se dérobe...


Tais-toi ! te dis-je.
Il n'est pas un

De ces tourments que mon désarroi ne connaisse

Déjà. —
Tu ne sais rien encor.
Je suis l'inexorable et froide enchanteresse

Qui, mieux qu'un stérile remords,

Distille l'essence même de la tristesse...
Place ! —
Que cache ton manteau ?


Quelques jours d'une paix qu'ignore la jeunesse.


Je ne t'attendais pas si tôt,

Gredine.
Mais, puisque te voilà, la plus fourbe

Des folles qu'abrita mon toit,
Maîtresse aux bras de glace et que l'arthrite courbe,

Salut,
Vieillesse !
Installe-toi.



Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012

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