Poèmes

Le Petit Poisson et le Pecheur

par Jules Laforgue

Jules Laforgue

Petit poisson deviendra grand.
Pourvu que
Dieu lui prête vie;
Mais le lâcher en attendant.
Je tiens pour moi que c'est folie :
Car de le rattraper il n'est pas trop certain.

Un
Carpeau, qui n'étoit encore que fretin,

Fut pris par un pêcheur au bord d'une rivière.

«
Tout fait nombre, dit l'homme en voyant son butin

Voilà commencement de chère et de festin :

Mettons-le en notre gibecière. »
Le pauvre
Carpillon lui dit en sa manière : «
Que ferez-vous de moi? je ne saurois fournir

Au plus qu'une demi-bouchée.

Laissez-moi carpe devenir ;.

Je serai par vous repêchée;
Quelque gros partisan m'achètera bien cher :

Au lieu qu'il vous en faut chercher

Peut-être encor cent de ma taille
Pour faire un plat : quel plat? croyez-moi, rien qui vaille. -
Rien qui vaille?
Eh bien! soit, repartit le
Pêcheur :
Poisson, mon bel ami, qui faites le prêcheur,
Vous irez dans la poêle; et vous avez beau dire,

Dès ce soir on vous fera frire. »

Un
Tiens vaut, ce dit-on, mieux que deux
Tu l'auras :
L'un est sûr, l'autre ne l'est pas.



Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012

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