Poèmes

Un Fou et un Sage

par Jules Laforgue

Jules Laforgue

Certain
Fou poursuivoit à coups de pierre un
Sage.
Le
Sage se retourne et lui dit : «
Mon ami.
C'est tort bien lait à toi, reçois cet écu-ci :
Tu fatigues assez pour gagner davantage.
Toute peine, dii-on, est digne de loyer.
Vois cet homme qui passe, il a de quoi payer;
Adresse-lui tes dons, ils auront leur salaire. »
Amorcé par le gain, noire
Fou s'en va faire

Même insulte à l'autre bourgeois.
On ne le paya pas en argent cette fois.
Maint estafier accourt : on vous happe notre homme,
On vous l'échiné, on vous l'assomme.

Auprès des rois il est de pareils fous :
A vos dépens ils font rire le maître.
Pour réprimer leur babil, irez-vous
Les maltraiter?
Vous n'êtes pas peut-être
Assez puissant.
Il faut les engager
A s'adresser à qui peut se venger.



Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012

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