Le tronc d'arbre que j'étreins
En rêve
N'est-il pas aussi irréel
Que celui que j'étreins dans la réalité
Pour sacrifier à une mode citadine
Puisque d'aucuns prétendent
Que la vie est un songe
Le rêveur serait rêvé
D'où la création jadis des poupées russes
Pour nous mettre la puce à l'oreille
Notez que la plus grande des matriochkas
En contient plusieurs autres et non pas
Une seule
Fausse piste
À moins que le rêveur qui rêve de moi
Ne soit lui-même le rêve d'un autre rêveur
Et ainsi de suite
Si j'abandonne cette hypothèse saugrenue
Force m'est de me demander
Comment Dieu pourrait-Il faire
Sept milliards de rêves en même temps
À Dieu rien n'est impossible
Me rétorqueriez-vous
Certes
Mais je trouve guère divin
Ce passe-éternité
Il peut avoir délégué cette tâche
Aux anges
Plus précisément aux anges gardiens
Non
Cela ne colle pas
Car certaines vies sont tissées
De péchés plus abjectes les uns
Que les autres
Et j'imagine mal nos on ne peut plus
Vertueux
Anges gardiens
Faire de tels songes
J'oublie les anges déchus
Ceux qui choisirent de suivre
Satan en enfer
Ces révoltés ne pourraient que prendre
Un malin plaisir
À rêver des vies où l'ignoble le dispute
Au monstrueux
Et si la vie n'était pas un songe
N'en déplaise
Au grand Pedro Calderón de la Barca
Si elle était aussi réelle que les troncs
Que nous étreignons
De temps à autre