à
Madeleine et
Boris
Lejeune
Dis, qu'as-tu compris ?
Je sens, je ressens,
Je vis en communion
Avec tout visage
Et du nuage au brin d'herbe,
Si je ne comprends pas.
Je me donne
A tout ce que je perçois
Ou que je devine.
Tu es là.
Sur un fond de ciel
Avec lequel
Tu n'as que faire,
Sauf le subir.
Pour ton bien
Ou pour le contraire :
Sa bénédiction
Ou sa colère.
Sur cette plage,
Sur ce sable devant l'océan,
Plus profond
Que tout ce que tu reçois :
Cette chose
Dont tu ne sais rien,
Qui te maintient en cet état
D'équilibre, de bien-être
Où tu aimes
Te sentir vivre.
Tu t'es livré
A tous ces paysages,
A chacun de leurs éléments.
Même quand tu étais loin.
Ils t'accompagnent,
Te font ce que tu es.
Tout ce que tu gagnes
A pouvoir
Te découvrir vague
De cet océan
Qui s'offre à toi
Pour t'incorporer
A son domaine
Qui t'enfanta !
Quand devant toi
Tu as l'océan
Tu fréquentes les abords
De ton intérieur.
Océan,
Pourquoi faire le fier,
Te moquer de la terre
A laquelle tu souffres
De te heurter ?
Que serais-tu sans elle,
Sans sa résistance
A tes épanchements ?
Pitié !
Toujours
Tu vois, tu touches
Dans le sable
De la pierre émiettée —
Et cela
Te fait vivre
Une sorte de douleur
Universelle.
Se regarder
Faire une grimace
C'est se venger
Des offenses reçues,
Cracher à la face
De la source des offenses,
Se transformer
En océan furieux.
Tu n'as jamais
A l'état de veille,
Rêvé
Que tu voguais
Avec les nuages
Et au-dessus d'eux
Dans cet espace infini
Que tu t'imagines.
Tu allais par des chemins
Pareils à d'autres chemins
Bordés de buissons.
Ces chemins circulaient
Au-dessus des nuages.
Tu t'approchais
Tantôt du soleil,
Tantôt des étoiles.
Heureux
Tu étais l'hôte
De la lumière.
Tu as trébuché —
Tu t'es réveillé.
C'est toujours comme si
A travers la lumière
Tu voulais atteindre
Une autre lumière
Qui te porterait.
En toi
Quelcpje chose
Qui ne cherche pas
A t'échapper : tu tiens,
Tu détiens un centre
Amant de sa propre lumière.
Nuage, ne continue pas
A t'occuper de moi.
Ce n'est pas moi, c'est l'océan
Qui est ton miroir.
Ne m'oblige pas
A te regarder,
Puisque tu ne peux
M'emportcr avec toi.
Ce n'est pas
En t'accrochant
A plus en plus de choses,
En les parcourant,
En les écoutant toutes
Que tu t'éprouveras.
Une seule chose parfois
Peut suffire
Si tu lui donnes
Assez de ton temps
Pour communier.
Voici
Qu'il fait lourd,
Très lourd.
C'est le ciel, on dirait
Qui pèse,
Même qu'il voudrait descendre
Et se faire enfermer.
Alors, nous
Qu'en serait-il
De nous ?
Existe-t-il
Des êtres qu'anime la passion
De contempler l'azur,
De s'y plonger,
De s'y incorporer,
De s'en abreuver,
Pour, après un bon moment,
S'en aller
Sûrs d'eux-mêmes.
Et de leur avenir
Couleur d'azur?
C'est moi
Ou ce n'est pas moi
Ce nuage blanc
Avec des yeux bleus,
Des joues arrondies,
Une courte barbe,
Ce petit nuage
Qui regarde tout
Avec l'amitié
Qu'il a pour lui-mi
Les nuages ont tous les droits
Et le vent est leur complice.
Ils occupent le ciel et tes yeux
Mais depuis
Que tu les as traversés
Ils ont perdu leur être.
Tu as vu leur intérieur,
Ils n'en ont pas.
Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012