N'analyse jamais ce cœur triste et subtil
Qui t'angoisse et te lie,
Tu n'y rencontreras, si généreux soit-il,
Que la mélancolie.
Dissèque froidement cette sincérité
Où ton âme se livre...
Le plus fol amoureux a toujours imité
Les mots de quelque livre.
Chasse le souvenir des candides serments
De celle que tu aimes,
Ton esprit n'y verra que sujets de romans
Et matière à poèmes.
N'évoque pas non plus les beaux jours consacrés
A l'ardente nature,
Ta mémoire, depuis, les a dénaturés
Par la littérature.
Le rapide présent ou le bel avenir
Ne charme ni ne touche,
Tel baiser donnera le cruel souvenir
D'une plus chère bouche.
Il te faut ignorer tout sentiment nouveau,
Toute tendresse douce,
Involontairement, le livresque cerveau
Les chasse et les repousse...
Mais du laurier, surtout, fuis les amers rameaux,
—
Tour d'ivoire et d'argile, —
Il n'est de calme vrai que parmi les tombeaux,
Farouche et sûr asile !
Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012