Poèmes

Au Pays de la Magie, I

par Henri Michaux

Henri Michaux

J'ai vu l'eau qui se retient de couler.
Si l'eau est bien habituée, si c'est votre eau, elle ne se répand pas, quand même la carafe se casserait en quatre morceaux.

Simplement, elle attend qu'on lui en mette une autre.
Elle ne cherche pas à se répandre au-dehors.

Est-ce la forme du
Mage qui agit ?

Oui et non, apparemment non, le
Mage pouvant n'être pas au courant de la rupture de la carafe et du mal que se donne l'eau pour se maintenir sur place.

Mais il ne doit pas faire attendre l'eau pendant trop de temps, car cette attitude lui est inconfoi table et pénible à garder et, sans exactement se perdre, elle pourrait
s'étaler pas mal.

Naturellement, il faut que ce soit votre eau et pas une eau d'il y a cinq minutes, une eau qu'on vient précisément de renouveler.
Celle-là s'écoulerait tout de suite.
Qu'est-ce qui la retiendrait ?

L'enfant, l'enfant du chef, l'enfant du malade, l'enfant du laboureur, l'enfant du sot, l'enfant du
Mage, l'enfant naît avec vingt-deux plis.
Il s'agit de les déplier.
La vie de l'homme alors est complète.
Sous cette forme il meurt.
Il ne lui reste aucun pli à défaire.

Rarement un homme meurt sans avoir encore quelques plis à défaire.
Mais c'est arrivé.
Parallèlement à cette opération l'homme forme un noyau.
Les races inférieures, comme la race blanche, voient plus le noyau que le dépli.
Le
Mage voit plutôt le dépli.

Le dépli seul est important.
Le reste n'est qu'épiphénomène.



Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012

Lettre d'Informations

Abonnez-vous à notre lettre d'information mensuelle pour être tenu au courant de l'actualité de Poemes.co chaque début de mois.

Nous Suivre sur

Retour au Top