Jupiter eut un fils, qui, se sentant du lieu
Dont il droit son origine,
Avoit l'âme toute divine.
L'enfance n'aime rien : celle du jeune dieu
Faisoit sa principale affaire
Des doux soins d'aimer et de plaire.
En lui l'amour et la raison
Devancèrent le temps, dont les ailes légères
N'amènent que trop tôt, hélas! chaque saison.
Flore aux regards riants, aux charmantes manières.
Toucha d'abord le cœur du jeune
Olympien.
Ce que la passion peut inspirer d'adresse,
Sentiments délicats et remplis de tendresse,
Pleurs, soupirs, tout en fut : bref, il n'oublia rien.
Le fils de
Jupiter devoit, par sa naissance,
Avoir un autre esprit, et d'autres dons des
Cieux,
Que les enfants des autres
Dieux :
Il sembloit qu'il n'agît que par réminiscence,
Et qu'il eût autrefois fait le méder d'amant.
Tant il le fit parfaitement!
Jupiter cependant voulut le faire instruire.
Il assembla les
Dieux, et dit : «
J'ai su conduire
Seul et sans compagnon jusqu'ici l'univers;
Mais il est des emplois divers
Qu'aux nouveaux dieux je distribue.
Sur cet enfant chéri j'ai donc jeté la vue :
C'est mon sang; tout est plein déjà de ses autels.
Afin de mériter le rang des
Immortels,
Il faut qu'il sache tout. »
Le maître du tonnerre
Eut à peine achevé, que chacun applaudit.
Pour savoir tout, l'enfant n'avoit que trop d'esprit.
«
Je veux, dit le
Dieu de la guerre.
Lui montrer moi-même cet art
Par qui maints héros ont eu part
Aux honneurs de l'Olympe, et grossi cet empire.
—
Je serai son maître de lyre.
Dit le blond et docte
Apollon. —
Et moi, reprit
Hercule à la peau de lion,
Son maître à surmonter les vices,
A dompter les transports, monstres empoisonneurs,
Comme hydres renaissants sans cesse dans les cœurs
Ennemi des molles délices,
Il apprendra de moi les sentiers peu battus
Qui mènent aux honneurs sur les pas des vertus. »
Quand ce vint au
Dieu de
Cythère,
11 dit qu'il lui montreroit tout.
L'Amour avoit raison : de quoi ne vient à bout
L'esprit joint au désir de plaire?
Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012