Myriam, du lieu où je suis
Je t'envoie ce que veut ton regard gris
Des orchis, un vol de ramiers
Ou ces gentianes que l'on cueille au pâturage
entre eau et nuage
L'air de la montagne y brûle encore
Avec le vent chaud et paisible des rochers
Je t'envoie aussi le reflet du temps pluvieux
au chemin où vient la salamandre
La musique du givre dans les sapins loin de toute
cendre
Les traces dans la terre noire derrière le chalet
Ou est-ce déjà ton image ô
Printemps
Si la belette et le loir lustré crient
Au tendre fourré où la mort peine À tenter de nous donner la paix
Au lieu où je suis, je ne sais plus très bien ces choses
Je ne peux que te les envoyer de l'autre rive
Comme si souvenir et métamorphose
Le monde renaissait à mon regret
Drôle de façon de communiquer avec autrui
De parler avec toi vivante, d'où je suis
Mais quel secret garder, que tu ne saches?
Tu vois que je ne veux plus rien, ni ne cache
Aucun de mes retours dans tes parages
Simplement je suis mort, et mes mots
Peut-être ne t'atteignent pas
Quel chemin prendre?
Comment ferai-je si longuement pour attendre
Que tu puisses répondre à ce message?
Myriam, si tu reçois ma lettre fais-moi signe
Les pauvres morts n'ont pas un sort très digne
Je t'envoyais des ailes, des rumeurs, le vent de
l'alpe
Je ne suis plus très sûr que ma voix porte
Hors de la cloison où je ne dors pas
Il paraît qu'il n'est pas question que j'en sorte
Ah pense à moi !
Je suis moins mort
Tout le temps qui reste
Si tu ne te presses pas de me rejoindre
Rien ne sert de souffrir ou de plaindre
La mort est ma demeure en terre agreste
Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012