Compère le
Renard se mit un jour en frais.
Et retint à dîner commère la
Cicogne.
Le régal fut petit et sans beaucoup d'apprêts :
Le galand, pour toute besogne,
Avoit un brouet clair; il vivoit chichement.
Ce brouet fut par lui servi sur une assiette :
La
Cicogne au long bec n'en put attraper miette;
Et le drôle eut lapé le tout en un moment.
Pour se venger de cette tromperie,
A quelque temps de là, la
Cicogne le prie. «
Volontiers, lui dit-il; car avec mes amis
Je ne fais point cérémonie. »
A l'heure dite, il courut au logis
De la
Cicogne son hôtesse;
Loua très-fort la politesse;
Trouva le dîner cuit à point :
Bon appétit surtout; renards n'en manquent point.
Il se réjouissoit à l'odeur de la viande
Mise en menus morceaux, et qu'il croyoit friande.
On servit, pour l'embarrasser,
En un vase à long col et d'étroite embouchure.
Le bec de la
Cicogne y pouvoit bien passer;
Mais le museau du sire étoit d'autre mesure.
Il lui fallut à jeun retourner au logis,
Honteux comme un renard qu'une poule auroit pris.
Serrant la queue, et portant bas l'oreille.
Trompeurs, c'est pour vous que j'écris :
Attendez-vous à la pareille.
Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012