Une traîtresse voix bien souvent vous appelle;
Ne vous pressez donc nullement :
Ce n'étoit pas un sot, non, non, et croyez-m'en,
Que le chien de
Jean de
Nivelle.
Un citoyen du
Mans, chapon de son métier,
Étoit sommé de comparaître
Par-devant les lares du maître.
Au pied d'un tribunal que nous nommons foyer.
Tous les gens lui crioient, pour déguiser la chose, «
Petit, petit, petit! » mais, loin de s'y fier,
Le
Normand et demi laissoit les gens crier. «
Serviteur, disoit-il; votre appât est grossier :
On ne m'y tient pas, et pour cause. »
Cependant un
Faucon sur sa perche voyoit
Notre
Manceau qui s'enfuyoit.
Les chapons ont en nous fort peu de confiance.
Soit instinct, soit expérience.
Celui-ci, qui né fut qu'avec peine attrapé,
Devoit, le lendemain, être d'un grand soupe,
Fort à l'aise en un plat, honneur dont la volaille
Se seroit passée aisément.
L'Oiseau chasseur lui dit : «
Ton peu d'entendement
Me rend tout étonné.
Vous n'êtes que racaille,
Gens grossiers, sans esprit, à qui l'on n'apprend rien.
Pour moi, je sais chasser, et revenir au maître.
Le vois-tu pas à la fenêtre?
Il t'attend : es-tu sourd? —Je n'entends que trop bien,
Repartit le
Chapon; mais que me veut-il dire?
Et ce beau cuisinier armé d'un grand couteau?
Reviendrois-tu pour cet appeau?
Laisse-moi fuir; cesse de rire
De l'indocilité qui me fait envoler
Lorsque d'un ton si doux on s'en vient m'appeler.
Si tu voyois mettre à la broche
Tous les jours autant de faucons
Que j'y vois mettre de chapons,
Tu ne me ferois pas un semblable reproche. »
Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012