Vieille demeure aux murs croulants, vieux temple où le hibou fait son nid de mousses d'Irlande, tu me fais penser, lorsque je te contemple, au roi
Lear pleurant au milieu des landes.
Quand il donna sa couronne à ses filles,
et tous ses trésors,
elles le chassèrent, alors,
la nuit, comme on fait aux vieux pauvres en guenilles.
Toi aussi, demeure lourde d'années, tu as eu un destin identique : et pourtant, que de fêtes tu as données, et de réjouissances magnifiques !
Tu nous prodiguas des souvenirs éclatants
et des réminiscences royales,
et cependant jamais une voix filiale
ne te cria :
Merci ! — dans la nuit des temps.
Et comme le vieux roi d'Angleterre, ton âge est bafoué par la pluie et la bise ; six cents ans le vent t'a soufflé au visage et s'est moqué de ta tête grise.
Mais voici l'aube, et ton peuple qui se réveille (on fait bien jaillir du feu d'un caillou) remplacera par une couronne vermeille sur ta tête chenue le bonnet du fou.
Voilà pourquoi, demeure aux murs croulants, vieux
temple où le hibou fait son nid de lichens d'Irlande, tu me fais penser, quand je te contemple, au roi
Lear pleurant au milieu des landes.
Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012