Poèmes

La Coupée

par Blaise Cendrars

Blaise Cendrars

On est enfin à quai un quai rectiligne moderne armé de grues de
Duisburg

Des mouchoirs s'agitent

On se fait des signes

Blanc-boubou-boubou-blanc m'a déjà oublié

Elle découvre dans la foule un long zigoto cuivré très chic

et indolent que je crois bien avoir déjà rencontré à
Paris
Elle est émue c'est beau puis lui fait signe de retenir un

porteur et lui fait comprendre par cris et par gestes

qu'elle a cinq malles de cabine et beaucoup beaucoup

d'autres bagages des grands et des petits
Moi je sais même tout ce qu'elle a dans ces malles car je

les lui ai bouclées ce matin alors qu'elle avait presque

une crise de nerfs
Au revoir gosselette gosseline elle passe maintenant la

coupée au bras de son type fin comme un chevreuil

inquiétant et attirant
Comme tout mélange princier de sang blanc et noir
Je songe au grand grigri créole qu'il porte dans sa culotte
Une voix monte du quai
Est-ce que
Monsieur
Biaise

Cendrars est à bord?
Présent!

Douze chapeaux s'agitent
Je débarque

Et l'on me photographie «
Monte là-dessus...
Monte là-dessus... »



Poème publié et mis à jour le: 13 November 2012

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