Poèmes

L'éducation

par Jules Laforgue

Jules Laforgue

Laridon et
César, frères dont l'origine

Venoit de chiens fameux, beaux, bien faits, et hardis,

A deux maîtres divers échus au temps jadis,

Hantoient, l'un les forêts, et l'autre la cuisine.

Ils avoient eu d'abord chacun un autre nom;

Mais la diverse nourriture
Fortifiant en l'un cette heureuse nature,
En l'autre l'altérant, un certain marmiton

Nomma celui-ci
Laridon.
Son frère, ayant couru mainte haute aventure.
Mis maint cerf aux abois, maint sanglier abattu,
Fut le premier
César que la gent chienne ait eu.
On eut soin d'empêcher qu'une indigne maîtresse
Ne fît en ses enfants dégénérer son sang.
Laridon négligé témoignoit sa tendresse

A l'objet le premier passant.

II peupla tout de son engeance :
Tournebroches par lui rendus communs en
France
Y font un corps à part, gens fuyants les hasards,

Peuple antipode des
Césars.
On ne suit pas toujours ses aïeux ni son père :

Le peu de soin, le temps, tout fait qu'on dégénère :

Faute de cultiver la nature et ses dons,

Oh! combien de
Césars deviendront
Laridons!



Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012

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