Plus loin que le lieu reconnaissable
Roud
Il était un pays temporel et intemporel
Où la lumière s'établissait au-delà de la lumière
Les sources y venaient du fond du ciel avec les
siècles
Puisqu'il n'y a ni limite ni dissemblance
entre l'ici et
Tailleurs
L'oiseau parlait parmi les morts
En ce temps-là
Gustave
Roud la sauge le mélilot
Eclairaient dans l'ombre et la pente
Comme l'étoile au regard des disparus
Comme luit le brouillard
avec la lampe au songe des morts
Et l'errant rôde et les chiens
tirent sur leur chaîne
Le soir est encore mieux l'époux de la solitude
et du poème sans nul repère
Si l'été brûle au lointain des campagnes perdues
Et la voix de la mère en moi ne se tait pas
La première neige la couvre à peine
Ou l'herbe le passage du vent dans la haie
qui ne cache jamais plus d'absence
Ainsi le laboureur se tenait à l'entrée des terres
Comme le poète dans les tombes
Frère d'absence sans hâte ni crainte
au double abîme
Ainsi la hache des bûcherons sonnait sans âge à l'orée
qui brille
La fumée de leurs feux montait dans l'air immobile
comme l'air du
Paradis
Où nul orage, nulle secousse ne défait la soie de l'heure
sans heure
Ne défend de passer la limite entre les vivants et les
morts
On cueille la vipérine dans l'air noir
L'alouette chante son chant atteignable et
inatteignable
Et vous aimiez ce signe de chair encore et sans matière
Roud
L'oiseau visible de la terre des morts
Et l'appel au puits maternel bleu
Un lieu donné
Un lieu révolu pour les vivants et pour les morts
Plus de tristesse
Roud plus d'attente
La mère enfin rendue au fils
Leurs mains secrètes à jamais liées
Ou leurs âmes ensemble envolées
Se parlant et chantant et se taisant dans l'air lisse
Avec l'oiseau l'étroit ruisseau le vent sur les feuilles
Aux yeux des morts le mélilot
Si le lieu maintenant accueille
la mère et le fils
Encore sur la rive terrestre où vient l'appel
Et pour l'Instant retrouvé hors de toute part
Déjà la halte non imaginable de l'éternel
O requiem de l'absente ô présente si tu es
Parmi nous menacée et buvant l'instant
Blessure d'éternité quand la corolle à la nuit
Fond comme un dernier feu dans l'air
Et chante avec les disparus à l'épaule des collines
Toi
Roud si tu sais qui t'appelle et te nomme
Et se plaint sans visage et de tout son visage
Ce regret de l'instant inépuisable
Dans la fausse paix lumineuse des morts
Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012