Poèmes

Deuxième Discours a Mme de la Sablière

par Jean de la Fontaine

Jean de La Fontaine

...
Ne point errer est chose au-dessus de mes forces;

Mais aussi, de se prendre à toutes les amorces,

Pour tous les faux brillants courir et s'empresser!

J'entends que l'on me dit : «
Quand donc veux-tu

Douze lustres et plus ont roulé sur ta vie : [cesser?

De soixante soleils la course entresuivie

Ne t'a pas vu goûter un moment de repos.

Quelque part que tu sois, on voit à tous propos

L'inconstance d'une âme en ses plaisirs légère,

inquiète, et partout hôtesse passagère.

Ta conduite et tes vers, chez toi tout s'en ressent.

On te veut là-dessus dire un mot en passant.

Tu changes tous les jours de manière et de style;

Tu cours en un moment de
Térence à
Virgile;

Ainsi rien de parfait n'est sorti de tes mains.

Eh bien ! prends, si tu veux, encor d'autres chemins :

Invoque des neuf
Sœurs la troupe tout entière;

Tente tout, au hasard de gâter la matière :

On le souffre, excepté tes contes d'autrefois. »

J'ai presque envie,
Iris, de suivre cette voix;

J'en trouve l'éloquence aussi sage que forte.

Vous ne parleriez pas ni mieux, ni d'autre sorte :

Serait-ce point de vous qu'elle viendrait aussi?

Je m'avoue, il est vrai, s'il faut parler ainsi,

Papillon du
Parnasse, et semblable aux abeilles

A qui le bon
Platon compare nos merveilles.

Je suis chose légère, et vole à tout sujet;

Je vais de fleur en fleur, et d'objet en objet;

A beaucoup de plaisirs je mêle un peu de gloire.

J'irais plus haut peut-être au temple de
Mémoire,

Si dans un genre seul j'avais usé mes jours;

Mais quoi ! je suis volage en vers comme en amours.



Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012

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