Ton malheur n'est pas si grand
Comme est la feinte
Puisqu'à ton cœur il défend
L'heur d'une plainte.
On peut bien plaindre et celer
Lorsqu'on soupire
Sans dire
Quels beaux yeux nous font brûler
En leur martyre.
Si tu as dedans le cœur
Cent mille flammes,
C'est pour être serviteur
D'autant de
Dames ;
Celui ne doit point avoir
Quelque espérance
Qui pense
Gagner, sans faire devoir,
La récompense.
Ton amour n'est rien que vent
Ni cette peine
Dont tu te plains si souvent
Que chose vaine ;
Aussi pour te guerdonner,
Ame légère
Espère
De te voir un jour donner
Même salaire.
Je ne vois que ma beauté
Sur d'autre excelle,
Ni sur quelque fermeté
Ton étincelle ;
Si l'on te voyait brûler
De vraie flamme
Dans l'âme,
Tu ne pourrais tant celer
Ce qui t'enflamme.
Quand mon œil n'aurait d'en haut
Pris origine,
Il verrait bien quel défaut
En toi domine ;
Un tas de jeunes amants
Plein d'inconstance
Ne pense
Qu'à se feindre des tourments
Pour récompense.
Tu fais bien de souhaiter
Qu'Amour accroisse
Tes flammes pour augmenter
Tant de tristesse ;
Lorsqu'on te verra souffrir,
Ayant éteinte
La feinte,
Espère voir secourir
Ton âme atteinte.
Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012