De fouler l’herbe verte me plaît tant
Qu’elle est humectée de rosée ; la pâquerette
Et la fleur de mai se content fleurette
Guettées par l’oiseau voletant
La vache a posé sa bouse fumant
Tranquillement sous le soleil ; une merlette
Tire un ver de terre et la violette
Est l’encens le champ parfumant
Six jonquilles au jaune éblouissant
Se tiennent à l’écart unies en une gerbe
Aussi superbe que sera le verbe
Du poète les yeux plissant
Je vois la vache et son veau se sauvant
A chaque fois que du sol mon pied se soulève
Et je suis sans doute un très bon élève
Qui attend quand vente le vent
Je sais comment vient le printemps et quand
Il fait monter la sève au cœur de sa princesse,
La feuille qui ne se cueille et ne cesse
De peupler l’espace vacant
A droite et à gauche et clopin-clopant,
Je vais de ci, de là quand une coccinelle
Pose en douceur sa patte fraternelle
Sur un laurier rose grimpant
C’est en dépassant un blanc cerisier
Que je sens un parfum de thym, de citronnelle
Flotter autour de la mauve prunelle
Près d’un petit taillis d’osier
Dans une terre aux couleurs caramel
Se dressent dix côtes blanches-vertes de bette
Dont on placera l’unique gambette
Sous une belle Béchamel
Ce légume, ici, est-il bienvenu
Avec ce large pied rougeâtre de rhubarbe ?
Je me lisse la moustache et la barbe :
Cela me semble convenu
Je questionne le pré qui se tait
Ainsi qu’un gros blaireau blanc et noir qui écrase
Mon herbe verte ; mon âme s’embrase :
« Et si j’exprimais un motet ? »
Un chant tourné vers la divinité
A remercier de la belle matinée
Où la fleur de mon cœur fut butinée
Dans sa tendre féminité.