Une chambre un rayon de ruche un souffle et le temps qui ne passe pas
Cela dure déjà depuis depuis combien depuis quand
Au-dehors il y a le soleil et la pluie
Au-dedans pas d'espoir qu'autrement cela vire
Mais il faut sa durée enfin pour toute chose
Rien n'est changé rien n'a bougé
C'est ici le palais de l'immobilité des meubles
Insensible pente à l'abîme
Quelqu'un se lève et marche et se rassied
Rien n'a plus signification qu'attendre
Attendre quoi
Attendre atteindre
Atteindre quoi
Atteindre éteindre
Déjà les gestes machinaux se sont rouilles
Que faire dont on n'ait pas honte
Comme des pieds et du tapis
Avant il y avait un verre d'eau peut-être une drogue
Un coussin qu'on arrange un drap
Qu'on tire
L'oreille guette au fond de l'air la respiration perpétuée
Et c'est un peu comme tuer chaque fois qu'on croit qu'elle s'arrête
Un bruit d'étoffe une toux quelqu'un
Se déplace
Tout à l'heure encore on avait la chance du chagrin
Des souvenirs un siège de pensées
Comment cela s'est-il peu à peu déformé
Il ne reste qu'angoisse vague et que cœur vain
Une armoire a craqué les regards se détournent
Ailleurs il se devine un va-et-vient
Le poids du corps passe d'un pied sur l'autre
On se sent bête de ses mains
Combien d'heures déjà combien d'heures encore
De jours qui sait l'Impatience craint de montrer son visage
Calme-toi calme-toi monstre intérieur
L'affreux sera quand c'est fini
Pour l'instant simplement tu prends ton propre pouls
Lui bien frappé qui bat d'un pas égal
Ni freiné ni plus vif
Faudrait-il croyez-vous baisser un peu plus les rideaux
Pourquoi baisser croyez-vous que la clarté lui soit blessante
Ah nous n'en sommes nous n'en sommes plus là
C'est en soi qu'on voudrait atténuer toute lumière
S'asseoir ou se lever pourquoi pourquoi
Tout que sais-je paraît intention révèle une hâte furtive
Je n'aurais jamais cru qu'en moi pourrait mûrir
Ainsi le fruit amer de voir quelqu'un mourir
Quelqu'un
Comment oser dire ce mot atroce
Et ma main sur ma lèvre en étouffe le bruit
Quelqu'un
Déjà ce n'est plus que quelqu'un par l'agonie
J'ai dit quelqu'un comme un battement de montre
La peur dépersonnalisée
Les autres ne devraient pas mourir c'est trop étrange
Cela n'appartenait qu'à moi jusqu'ici semblait-il
De quel droit tombent-ils de moi comme parts de moi-même
Et lentement si lourdement avec ça
Que se passe-t-il
Rien
J'avais cru comprendre
Le temps reprend son cours à petites gorgées
Songer à tout fait autre chose songer
A des détails insignifiants de la vie
Le mouchoir dans les doigts vous fait un air inutilement
pathétique
Oh surtout éviter cette préfiguration des cris et des pleurs
Ne pas avoir mal avant l'heure voilà
Ce qui profondément me préoccupe
Ce serait devancer ce qui vient indécemment devancer ce qui vient
Est-ce une illusion le souffle est-il plus court
Je ne sais pas
Peut-être et plus sombres les ombres
Il m'a semblé
Sa main
Pure nervosité
On entend sourdement au-dehors les voitures
Ce quartier vers le troisième étage a toujours une certaine
qualité de noir
Vous n'avez pas faim cela peut prendre encore excusez-moi
Il est neuf heures du soir
La sonnette du cinéma
Tout va comme si de rien n'était même nous-mêmes
Et le
Tanagra sur la cheminée
Les bibelots
Seigneur le hasard des bibelots
Regardez-les si vous pouvez sans en frémir
C'est bien le pire
Et la poussière
Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012