Si ce n'était pas vrai -
Que je crève!
J'ai vu dans mes yeux, dans mon rêve,
La
Notre-Dame des brisans
Qui jetait à ses pauvres gens
Un gros navire sur leur grève...
Sur la grève des
Kerlouans
Aussi goélands que les goélands.
Le sort est dans l'eau : le cormoran nage,
Le vent bat en côte, et c'est le
Mois
Noir...
Oh ! moi je sens bien de loin le naufrage !
Moi j'entends là -haut chasser le nuage!
Moi je vois profond dans la nuit, sans voir!
Moi je siffle quand la mer gronde,
Oiseau de malheur à poil roux!...
J'ai promis aux douaniers de ronde,
Leur part, pour rester dans leurs trous..
Que je sois seul ! — oispau d'épave
Sur les brisans que la mer lave...
Oiseau de malheur à poil roux!
—
Et qu'il vente la peau du diable!
Je sens ça déjà sous ma peau.
La mer moutonne!...
Ho, mon troupeau!
—
C'est moi le berger, sur le sable...
L'enfer fait l'amour. —
Je ris comme un mort —
Sautez sous le
Bût... le
Hû des rafales,
Sur les noirs taureaux sourds, blanches cavales !
Votre écume à moi, cavales d'Armor/
Et vos crins au vent!... —
Je ris comme un mort —
Mon père était un vieux saltin *,
Ma mère une vieille morgate **...
Une nuit, sonna le tocsin :
—
Vite à la côte : une frégate! — ..Et dans la nuit, jusqu'au matin,
Us ont tout rincé la frégate...
—
Mais il dort mort le vieux saltin.
Et morte la vieille morgate...
LÃ -haut, dans le paradis saint,
Ils n'ont plus besoin de frégate.
Poème publié et mis à jour le: 16 November 2012