Poèmes

Le Lais

par François Villon

François Villon

En ce temps que j'ai dit devant,
Sur le
Noël, morte saison,
Lorsque les loups vivent de vent,
Et qu'on se tient en sa maison,
Pour le frimas, près du tison,
Me vint le vouloir de briser
La très amoureuse prison
Qui souloit mon cueur debriser.

Le regard de celle m'a prins
Qui m'a esté félonne et dure :
Sans ce qu'en riens aye mesprins,
Veut et ordonne que j'endure
La mort, et que plus je ne dure;
Si n'y voy secours que fuir.
Rompre veut la vive soudure,
Sans mes piteux regrets ouïr !

Pour obvier à ces dangiers,

Mon mieux est, je croy, de partir.

Adieu !
Je m'en vois à
Angiers :
Puisqu'el ne me veut impartir
Sa grâce, il me convient partir.
Par elle meurs, les membres sains !
Au fort, je suis amant martyr
Du nombre des amoureux saints!



Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012

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