La singularité du visage d'Isabelle était faite de ces blancheurs de linge, de ces éclatantes étendues de mer calme entre deux coups de ressac, de ces plages accueillantes
de lumière lisse d'un après-midi de juillet sur un toit d'ardoises.
Une encolure choisie, faite pour les nobles harnais du cheval de bataille, ses seins plantés comme des chevilles pour l'escalade d'un bel arbre, la prise qu'ils appelaient de deux mains
ouvertes et accueillantes, des yeux compliqués et préhensiles comme la vrille du pois de senteur, des volontés brutales et folâtres comme un coup de mer contre une
jetée par le jour du plus beau temps, je me rappelle tout comme si c'était hier.
Par-dessus toute qualité, j'admirais qu'elle pût être à ce point ambiguë — ses mains changent comme le vent, ses pieds lisses se posent par le monde sur je ne
sais quel sonore ouragan de tuiles, et, singulière comme ces transmutations à vue qu'un prince charmant d'un haussement de sourcil encourage dans les enlacements de la
Belle et de la
Bête, c'est tout à coup d'un profil perdu de cette figure étrange sur un fond de forêts et de feuilles changeantes qu'est faite — maniaque et toujours à je ne
sais quel souvenir perdu attentive — la beauté du visage d'Elisabeth.
Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012