Quand viendra le siècle doré ',
Qu'on verra
Dieu seul adoré,
Loué, chanté, comme il l'ordonne,
Sans qu'ailleurs sa gloire l'on donne?
Quand n'auront plus ne cours ne lieu
Les chansons de ce petit
Dieu
A qui les peintres font des ailes ?
O vous dames et damoiselles
Que
Dieu fit pour être son temple
Et faites sous mauvais exemple
Retentir et chambres et salles
De chansons mondaines ou sales,
Je veux ici vous présenter
De quoi sans olTense chanter,
Et sachant que point ne vous plaisent
Chansons qui de l'amour se taisent,
Celles qu'ici présenter j'ose
Ne parlent, certes, d'autre chose;
Ce n'est qu'amour.
Amour lui-même
Par sa sapience suprême
Les composa et l'homme vain
N'en a été que l'écrivain.
Amour, duquel parlant je vois,
A fait en vous langage et voix
Pour chanter ses hautes louanges,
Non point celles des dieux étranges
Qui n'ont ne pouvoir ni aveu
De faire en vous un seul cheveu.
L'amour dont je veux que chantez
Ne rendra vos eccurs tourmentés
Ainsi que l'autre, mais sans doute
Il vous remplira l'âme toute
De ce plaisir solacieux
Que sentent les
Anges aux cieux,
Car son
Esprit vous fera grâce
De venir prendre en vos cœurs place
Et les convertir et muer,
Faisant vos lèvres remuer
Et vos doigts sur les épinettes
Pour dire saintes chansonnettes.
O bienheureux qui voir pourra
Florir le temps que l'on orra
Le laboureur à sa charrue,
Le charretier parmi la rue,
Et l'artisan en sa boutique
Avecques un
Psaume ou
Cantique
En son labeur se soulager ;
Heureux qui orra le berger
Et la bergère au bois étant
Faire que rochers et étangs
Après eux chantent la hauteur
Du saint
Nom de leur créateur.
Souffrircz-vous qu'à joie telle
Plutôt que vous,
Dieu les appelle?
Commencez, dames, commencez,
Le siècle doré avancez,
En chantant d'un cœur débonnaire
Dedans ce saint
Cancionnaire,
Afin que du monde s'envole
Ce
Dieu inconstant d'amour folle,
Place faisant à l'amiable
Vrai
Dieu d'amour non variable.
Le premier jour d'août .
Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012