«
On languit, on meurt près de
Sylvie :
C'est un sort dont les rois sont jaloux.
Si les dieux pouvaient perdre la vie,
Dans vos fers ils mourraient comme nous.
Soupirant pour un si doux martyre,
A
Vénus ils ne font plus la cour ;
Et
Sylvie accroîtra son empire
Des autels de la mère d'amour.
Le printemps paraît moins jeune qu'elle ;
D'un beau jour la naissance rit moins :
Tous les yeux disent qu'elle est plus belle,
Tous les cœurs en servent de témoins.
Ses refus sont si remplis de charmes,
Que l'on croit recevoir des faveurs :
La douceur est celle de ses armes
Qui se rend la plus fatale aux cœurs.
Tous les jours entrent à son service
Mille amours, suivis d'autant d'amants ;
Chacun d'eux, content de son supplice,
Avec soin lui cache ses tourments.
Sa présence embellit nos bocages ;
Leurs ruisseaux sont enflés par mes pleurs :
Trop heureux d'arroser des ombrages
Où ses pas ont fait naître des fleurs.
L'autre jour, assis sur l'herbe tendre,
Je chantais son beau nom dans ces lieux :
Les zéphyrs, accourant pour l'entendre,
Le portaient aux oreilles des dieux.
Je l'écris sur l'écorce des arbres ;
Je voudrais en remplir l'univers.
Nos bergers l'ont gravé sur des marbres
Dans un temple, au-dessus de mes vers. »
C'est ainsi qu'en un bois solitaire
Lycidas exprimait son amour.
Les échos qui ne sauraient se taire,
L'ont redit aux bergers d'alentour.
Poème publié et mis à jour le: 12 July 2017