Des philosophes aux mains de joueurs des nécromants aux lèvres de buveurs des assassins aux regards plus légers que des plumes
d'oiseau c'est cette foule voyageuse aux pieds éternellement pris
dans des lacets de sable qui compose l'étrange nation dont le drapeau de sang lut teint de cette nuance maléfique un jour que les
poissons par amour du désastre décidèrent de se vouer au feu et d'abandonner l'eau
Fruits de misère
gonflerez-vous vos prunelles éclatantes jusqu'à briser
les sexes et les colonnes les carcasses défigurées
les astres ravagés par
Je désir des chairs d'alcool les profils liés à l'histoire des caresses les crânes de pierre les croupes figées?
Chaque objet traîne avec soi le cône d'ombre qui est la rançon de sa lumière
et sur le bord de cet entonnoir aux parois abruptes il vacille
n'attendant qu'une lame et sa pointe meurtrière
pour supprimer ce cône ou l'y précipiter
Les chaînes qui nous lient ont des anneaux de toutes sortes
mailles claires mailles obscures constamment alternées
Au grand-mât des chairs vivantes pend une voile parfaitement blanche
découpant sur la mer le couteau noir de son triangle reflété
mais les corsaires qui parcourent l'océan à la poursuite d'un trésor
conduits par leur figure de proue
sont seuls capables de choisir entre l'ombre et la proie
Lumière et sang
Sang et ombre
Sang et proie
Lumière de proie
Sang de l'ombre
une enclume de sang qui n'est ni proie ni ombre se livre
aux marteaux des forges de folie lointaines forges en travail dans les terres les plus
profondes la profondeur solide de l'ombre où le sang de la terre
est enseveli
Un jour
le bruit des siècles n'était plus qu'un faible tintement de cloches
au creux des oreilles d'une femme endormie
sur une plage que le mur immobile de la mer
transformait en préau de prison
Ses cheveux répandus sur le sol et confondus avec son
ombre engendraient un faisceau de racines cône noir qui la
fixait au sable dans l'attente d'une troupe de pirates qui viendraient
la délivrer
Les arbres échangeaient leurs étreintes végétales les cristaux s'accroissaient les étoiles bougeaient mais
terre et ciel air et feu
vous suerez sang et eau avant d'avoir atteint cette merveilleuse figure qui n'est pas seulement rivée au sable d'une plage
par sa chevelure d'ombre mais se cache aussi dans les plis de tous les rideaux les sculptures rompues les pièges rouilles les ossements
dispersés la bave des mousses et des ruisseaux à l'heure où les cadavres font grincer leurs armatures rongées par le contact caché de tant de langues parmi les
craquements d'édifices les échos forestiers et
les cris de chevaux dans les caves de l'amour aux moellons de démence
Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012