Poèmes

A la Bouche

par Max Elskamp

Et c'est d'abord par deux, par trois,
Misères à petites croix :

Pain dur et froid ainsi qu'un givre
Et qui renchérit à la livre,

Et neige en linceul comme un mort,
Imposant aux champs son décor.

Puis, c'est gerçure aux mains qui brodent,
Retardant les doigts qu'incommode

Le fil, et lors, aux mauvais yeux,
Les lampes dures au milieu

Des aiguilles allant-allées
Au long des toiles déroulées ;

Et c'est après, et c'est encor,
Portes de bois où font les morts.

Ceux qui savent quotidienne

La plainte des enfants qui viennent

Comme des oiseaux, sans raison,
Regarder rire les maisons.

Or, c'est ainsi le mauvais leurre
Des cadrans qui disent les heures,

Montrant, à midi-des-repas,
Chambre blanche et vides les plats ;

Puis, c'est aussi par deux, par trois,
Bouches mourantes et sans voix

Pour se plaindre de leur calvaire,
Et c'est alors grande misère.

Mais joie de mon cœur réjoui, —
Elle est si bonne cette année —
Mais joie, pour la faim, j'ai des fruits

Que printemps très doux a noués,
Et, pour la soif aussi, des puits
D'eaux heureuses de se donner,

Plus
Noël ! des bois désireux
De faire hiver doux, cette année,
Dans mes maisons avec du feu.

Or, c'est beau temps et sans adieu,
Automne et riez les dents blanches,
Et mes paniers faites au mieuxDans les greniers où c'est dimanche

De choses chères aux gens vieux

Qui s'en vont comme sous des branches,

Des
Louises-bonnes-d'Avranches,
A tous mes
Bons-Chrétiens, pieux
Prendre soin avec leurs mains blanches.

Mais lors, c'est mon cellier qu'on range
Et, bouches, exaucez vos vœux
Et riez, les enfants aux anges,

A lèvres allées jusqu'aux yeux,
Comme aux fêtes ici l'on mange
Les jeunes à côté des vieux,

Pour que vos cœurs n'aient plus de doute
Et que les mots que je vous dis
Soient vraiment ceux que l'on écoute.

Car, je vous prendrai dans ma barque,
Aussi mes frères et mes sœurs,
Et mes bons cousins les pécheurs
Vous diront où le poisson parque,

Dans la mer de leurs jours entiers
Où, jusqu'à paniers criant grâce,
C'est marée s'entassant aux nasses,
Comme ouailles dans un sentier.

Or, vous verrez lors mes filets,
Et comme
Pierre est secourable
Aux jeudis qu'il veut favorables
Pour la sole et le carrelet,

Et le lundi
Jean en personne,
En basses eaux à flot d'Automne,
Aux écoutes rendre la main
Quand le brouillard dit les églefins,

Comme aussi fêtes sur vos tables
Les femmes d'ici à bras nus,
Et miracles de saintes-fables
Alors à bouche que veux-tu.



Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012

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