Tu rirais d'un pauvre diable qui t'aimerait et, cependant, tu pourrais devenir la chienne d'un homme qui ne t'aimerait pas et rirait.
Crois-moi : préfère le pauvre diable sans haine qui serait pour toi très complaisant et très doux.
Puis, qu'est-ce qui te dit que, comme une chérie, tu ne mettrais pas tes minces bras à son cou en croisant tes petits doigts comme quand on prie ?
Va : n'attends pas un grand poète à cheveux longs : il n'en existe pas plus que des mousquetaires ou que des princes russes distingués et blonds : le bien-aimé ne se trouve
pas sur la terre; et pourtant devant le pauvre diable tu ris parce que tu lisais, étant toute petite, dans les livres de distribution des prix que les beaux fiancés se faisaient aimer
vite.
Regarde les vieux qui sont ridés et tout blancs
et qui dans leur temps croyaient, eux aussi, des choses :
ils ont de grosses veines dans leurs doigts tremblants et sont confus de s'être offert jadis des roses.
Puis, je crois que, si l'on a plus tard des enfants, il vaut mieux qu'un peu d'amitié vous rapproche : car l'amitié fait mieux aimer l'enfant — souvent la femme embrasse son
mari contre son mioche.
Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012