Je sais que tu as ce souhait
Qui tant me chagrine et me peine
De plaire à la fontaine pleine
De ces eaux claires que tu hais
Il n’est pas beau d’aimer le seau
Captif de la liquide vie
Arrivé d’un fougueux ruisseau
Qui rendit la plaine ravie.
La fontaine a bien du talent
Et ne doute pas qu’elle est belle
Mais demeure bon an mal an
Eloignée de la mirabelle
Et de tous les fruits du verger
Qui s’engorgent de l’offre aqueuse
Comme les brebis du berger
Qui rafraîchissent leur muqueuse
Fontaines, seaux, brocs, robinets
Ont certes un charme indéniable
Mais il ne sont que cabinets
Où attend le patient aimable
Qui aura son laisser-passer
A donner sans arrêt à boire
A tous ceux qui vont repasser
Après avoir bu Seine et Loire
Toi tu n’aimes pas ce patient
Qui va de la pièce à la bouche
Avec un tel coefficient
Que se bouche parfois la douche
Dont la pomme sent le frisson
Traverser ses trous minuscules
Qui se pâment à l’unisson
En maudissant les canicules
Tu voudrais que ces claires eaux
Viennent pour n’aimer que ta pomme
Avec l’aide de ces réseaux
Construits avec les seaux et l’homme
Jaloux, jaloux, tu es jaloux
Et tu ne vois que la fontaine
Si belle et toi tu as mal où
Ton cœur se croit en quarantaine.