L'innocente
Léda baignait ses membres nus,
La grâce de son corps enchantait l'eau du fleuve,
Et les roseaux, saisis de troubles inconnus,
Chantaient une chanson aussi vieille que neuve,
Quand le cygne parut, blanche nef sur le fleuve.
Quand le cygne parut, blanche nef au front d'or,
Léda tressaillit d'aise et demeura songeuse,
Puis, lentement, sans bruit, elle revint au bord
Et se coucha dans l'herbe, à l'ombre d'une yeuse ;
La bête s'avançait, belle, ardente et songeuse.
La bête s'avançait, belle, ardente, et d'un air
Si royal et si mâle, que
Léda fut charmée
Et qu'elle regretta, dans l'erreur de sa chair,
De n'être pas un cygne, afin d'être aimée
Parmi l'ombre et parmi l'herbe molle et charmée.
Parmi l'ombre et parmi l'herbe molle et les lys,
Léda se ploie au poids de l'animal insigne
Tout ruisselant encore des eaux de
Simoïs,
Et son corps étonné frissonne et se résigne
A ne caresser que le plumage d'un cygne.
Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012