Poèmes

Le Soir D'une Bataille

par Charles Marie Rene Leconte de Lisle

Charles Leconte de Lisle

Tels que la haute mer contre les durs rivages,
À la grande tuerie ils se sont tous rués,
Ivres et haletants, par les boulets troués,
En d'épais tourbillons pleins de clameurs sauvages.
Sous un large soleil d'été, de l'aube au soir,
Sans relâche, fauchant les blés, brisant les vignes,
Longs murs d'hommes, ils ont poussé leurs sombres lignes,
Et là, par blocs entiers, ils se sont laissés choir.
Puis, ils se sont liés en étreintes féroces,
Le souffle au souffle uni, l'oeil de haine chargé.
Le fer d'un sang fiévreux à l'aise s'est gorgé ;
La cervelle a jailli sous la lourdeur des crosses.
Victorieux, vaincus, fantassins, cavaliers,
Les voici maintenant, blêmes, muets, farouches,
Les poings fermés, serrant les dents, et les yeux louches,
Dans la mort furieuse étendus par milliers.
La pluie, avec lenteur lavant leurs pâles faces,
Aux pentes du terrain fait murmurer ses eaux
Et par la morne plaine où tourne un vol d'oiseaux
Le ciel d'un soir sinistre estompe au loin leurs masses.
Tous les cris se sont tus, les râles sont poussés.
Sur le sol bossué de tant de chair humaine,
Aux dernières lueurs du jour on voit à peine
Se tordre vaguement des corps entrelacés ;
Et là-bas, du milieu de ce massacre immense,



Poème publié et mis à jour le: 16 November 2012

Lettre d'Informations

Abonnez-vous à notre lettre d'information mensuelle pour être tenu au courant de l'actualité de Poemes.co chaque début de mois.

Nous Suivre sur

Retour au Top