Autrefois, quand l'essaim fougueux des premiers rêves
Sortait en tourbillons de mon coeur transporté ;
Quand je restais couché sur le sable des grèves,
La face vers le ciel et vers la liberté ;
Quand, chargé du parfum des hautes solitudes,
Le vent frais de la nuit passait dans l'air dormant,
Tandis qu'avec lenteur, versant ses flots moins rudes,
La mer calme grondait mélancoliquement ;
Quand les astres muets, entrelaçant leurs flammes,
Et toujours jaillissant de l'espace sans fin,
Comme une grêle d'or pétillaient sur les lames
Ou remontaient nager dans l'océan divin ;
Incliné sur le gouffre inconnu de la vie,
Palpitant de terreur joyeuse et de désir,
Quand j'embrassais dans une irrésistible envie
L'ombre de tous les biens que je n'ai pu saisir ;
Ô nuits du ciel natal, parfums des vertes cimes,
Noirs feuillages emplis d'un vague et long soupir,
Et vous, mondes, brûlant dans vos steppes sublimes,
Et vous, flots qui chantiez, près de vous assoupir !
Ravissements des sens, vertiges magnétiques
Où l'on roule sans peur, sans pensée et sans voix !
Inertes voluptés des ascètes antiques
Assis, les yeux ouverts, cent ans, au fond des bois !
Nature ! Immensité si tranquille et si belle,
Majestueux abîme où dort l'oubli sacré,
Poème publié et mis à jour le: 16 November 2012