En ce propos grandement travaillai
Jusqucs à tant qu'en sursaut m'éveillai,
Un peu devant qu'Aurora, la fourrière
Du clair
Phcbus , commençât mettre arrière
L'obscurité nocturne sans séjour,
Pour éclaircir la belle aube du jour.
Si me souvint tout à coup de mon songe,
Dont la plupart n'est fable ne mensonge.
A tout le moins pas ne fut mensonger
Le
Bon
Espoir, qui vint à mon songer :
Car vérité fit en lui apparaître
Par les vertus qu'en vous il disait être.
Or ai-je fait au vueil du dieu
Mercure,
Or ai-je pris la hardiesse et cure
De vous écrire à mon petit pouvoir,
Me confiant aux paroles d'Espoir,
Le bon vieillard, vrai confort des craintifs,
A droit nommé repaisseur des chétifs,
Car repu m'a toujours sous bonne entente
En la forêt nommée
Longue
Attente :
Voire et encor de m'y tenir s'attend,
Si votre grâce envers moi ne s'étend.
Parquoi convient qu'en espérant je vive,
Et qu'en vivant tristesse me poursuive.
Ainsi je suis poursui, et poursuivant
D'être le moindre et plus petit servant
De votre hôtel (magnanime
Princesse) ;
Ayant espoir que la vôtre noblesse
Me recevra, non pour aucune chose
Qui soit en moi pour vous servir enclose;
Non pour prier, requête ou rhétorique,
Mais pour l'amour de votre
Frère unique,
Roi des
Français, qui à l'heure présente
Vers vous m'envoie, et à vous me présente
De par
Pothon l, gentihomme honorable.
En me prenant,
Princesse vénérable,
Dire pourrai, que la nef opportune
Aura tiré de la mer d'infortune,
Maulgré les vents, jusque en l'île d'Honneur
Le pèlerin exempté de bonheur;
Et si aurai par un ardent désir
Cœur et raison de prendre tout plaisir
A éveiller mes esperits indignes
De vous servir, pour faire œuvres condignes,
Tels qu'il plaira à vous, très haute
Dame,
Les commander ; priant de cœur et d'âme
Dieu tout puissant, de tous humains le
Père,
Vous maintenir en fortune prospère,
Et dans cent ans prendre l'âme à merci,
Partant du corps sans douleur ne souci.
Poème publié et mis à jour le: 14 November 2012