Poèmes

La Foret de L'Enfant Perdu

par Max Jacob

Max Jacob

Dans le bois des enfants perdus où l'on n'entend pas de prières nous jouons au « cheval fondu » aux « quatre coins » dans la clairière, nous cherchons
Dieu.

Tu cherches
Dieu, chacun cherche et s'ennuie.
La dame folle est sur son canapé.
Tant sont mouillés ces bandits alanguis !
De quoi son homme était-il occupé ?

Tu cherches
Dieu comme on cherche fortuni heurtant du bec à l'azur de la lune ou de la main au rempart du bureau ... en pyjama sur le pont des bateaux ? nous cherchons
Dieu.

Kabir,
Hafiz,
Ram et
Tagor ** les moines du
Temple d'Angkor furent gens de
Sainte liesse.
Par
Dieu ! que
Jésus les connaisse !
Et les
Saints rabbins mes aïeux.
Ils cherchaient
Dieu.

Tournant, virant, atrabilaire — de
Dieu l'école buissonnière — dis-mo,, frère des gens perdus, assis sur un monceau de pierres serait-ce pas malentendu si ton âme reste en jachère ?
Hommes trop joyeux ou revêches dans vous-mêmes innovez la
Crèche pour récupérer l'innocence : vous aurez votre délivrance en trouvant
Dieu.

Frappez sur mon briquet

pour dénicher votre lumière

Mon
Seigneur ! quotidien et sitôt égaré.

L'habitude et l'ennui, l'orgue thuriféraire

les bavards qui jouent de votre nom au bilboquet

les monstres osmotiques, les diables camarades

brouillent sans se lasser vos empreintes en moi

ne pouvez-vous laisser au soleil de vos rades

mon trois-mâts et ses voiles dorées du
Saint-Esprit.

Vous, prêtres, pour enfants prêchez des gentillesses

recommandez en chaire la gaieté, la richesse !

« nous avons au
Sacré-Cœur l'Almanach
Gotha

et des échantillons du
Golgotha dans le
Bottin

qui n'a pas sa fleur artificielle et sa médaille ?

Que la mort noire de
Dieu s'en aille ! »

Seigneur ! clouez ma porte avec des planches

et fermez le portail en bas.

Enlevez-moi ce téléphone d'avalanche.

Je ne saurai rien d'ici-bas.

Ange du
Jugement prenez votre trompette

et que s'approchent de moi l'amour et le néant

quand vous n'entendrez plus le bruit de mes défaites

j'entendrai pour jamais celui de vos amans.

Gloire au
Père céleste au-dessus des monts

au-dessus des monts, au-dessus des mondes

Père du créé, créateur,
Perfection

dont la copie est l'humaine création.

A vous je confie cette méditation

il s'agit de savoir dans quels buts

nous sommes à côté des démons
Belzébuth

pourquoi il connut nos noms sur terre

et ce qu'on est venu y faire.

Dieu nous a mis ici par charité

pour nous faire participer à sa bonté

c'est beaucoup d'Honneur.
Il nous promet en partage

du mieux futur si l'on est sage

de pire en pire si nous courons

au lieu de recueillir son sang et son pardon.

Par tous les bouts nous tenons à
Dieu

avant la naissance après le dernier adieu

nous tenons à vous mon
Dieu.

Tout le reste n'est que foutaise

chercher l'argent, la gloire, chercher les aises.

Qui nous a mis là ? qui nous en tirera

ce n'est pas le voisin ni le gendarme

c'est
Dieu.
A lui nous devons tout

qu'on s'y prenne comme on voudra

il n'y a pas de doute pour celui qui n'est pas fou

à moins de croire qu'il n'y a rien du tout.

Mon
Dieu nous
Vous devons tout.

Or il nous a tracé le chemin

qui peut faire de nous des saints,

il l'a dit dans les Évangiles et dans les commandements.

Voilà ce qu'il faut pour être mon enfant.

S'il l'a dit c'est que c'est important.

Et en effet qu'y a-t-il de plus grave

que d'éviter l'Enfer, son supplice et sa cave

puisqu'il est éternel et la terre est passage

qu'y a-t-il de plus gentil

que de vivre avec
Toi dans ton beau
Paradis.

Et si cela est ce qu'il y a de plus grave

c'est donc le sens de la vie que tu as vu.

Le sens de la vie c'est la mort

la mort et la qualité de ton sort.

Il faudrait y penser plus souvent

et ne pas vivre à l'évent

comme font la plupart des gens.



Poème publié et mis à jour le: 12 July 2017

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