Poèmes

Bénéfices de Dieu

par Max Jacob

Max Jacob

Ô toi agenouillé sur les prés de l'église

regarde un peu où tes crimes te conduisent

devant un
Dieu si bon, si puissant et si beau

regarde tes méfaits et ta vie de sabot.

Dieu s'est montré à toi et que fais-tu pour lui ?

Frappe-toi la poitrine, indigne, et dis « merci ».

Tu craques de partout, tu t'affoles et tu pèches

au lieu de préserver ra poitrine où tu bêches.

Dieu t'a donné l'esprit, l'intelligence et tout

il a donné sa mort, sa vie ; crains son courroux.

Dieu est patient et toi quelle délicatesse ?

Un rien te tourne et vire du côté de ta graisse.

Sois innocent, sois un enfant, vois ce tableau

d'un noir démon occupé de sa peau

et du
Dieu puissant qui te rappelle à l'ordre.

N'est-ce pas abuser de sa miséricorde

que de se confesser si souvent et si mal

et aussitôt après retourner à son mal.

Ce qui fait la grandeur de l'homme

l'as-tu ?
As-tu la lance en main, sur la tête le heaume

de la sagesse et de la volonté préservatrice

où est la lutte en toi ? où sont tes cicatrices ?

Bête et coquet, dur au moindre prochain

et l'orgueil broché sur cuirasse d'airain.

Bien entendu, je comprends mal

étant plus bête qu'un cheval

il en résulte un certain ridicule

je joue d'horribles infâmes rôles

et je me fais prendre pour un drôle

les uns me croient un demi-saint

d'autres voient juste en voyant « serin ».

Il faut en convenir chez mes meilleurs amis

je suis taxé d'infamie.

Et tout cela si lourd si bête

lourd comme mon profil et ma tête.

Qui vivra verra

Tête et queue de rat.

Tout de même l'enfer,

et ses grilles en fer.

Pendant que je me livre à toutes les fantaisies

de ma bêtise immense et profonde

Dieu maître premier de la terre et de l'onde

me comble de miséricorde et de pardon.

Il me traite comme son petit garçon

à qui l'on donne des bonbons

tous les matins messe, communion

tribunal de
Grâces, confessions

et j'arrive là avec mes colères

mes susceptibilités, mes inclinations grossières

avec mes airs supérieurs et mon arrogance

avec mon « tout pour la panse »

ma fatigue pour tout ce qui pense

et la visible infériorité

d'un homme qui se croit élevé.

Dieu ! regardez mes souffrances

elles sont archiméritées

par un imbécile fieffé qui se met dans des situations atroces

soit parce qu'il a voulu être rosse

soit parce qu'il n'a pas su être bon.



Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012

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