Poèmes

Vers les Yeux des Sirènes

par Pierre Louÿs

Qu'on déserte la ville! que nul rallume

L'autel! nous laisserons à tout jamais,ce soir,

Les dieux horribles de la terre,et dans le noir

Nous partirons,suivis par un frisson d'écume...

La nef impérieuse à travers l'amertume

Bondira, tranchant l'eau du fil de son coupoir

Et nous nous pencherons sur la proue, à l'espoir

De vos terribles voix, déesses de la brume!

Grands poissons glauques d'où fleurissent des corps blancs,

Nus miroirs de la lune et des flots nonchanlants,

Vous qui chantez vos yeux dans les algues,
Sirènes!

Quand nous aurons touché vos bouches, vous pourrez,

D'un signe seulement de vos doigts adorés,

Délivrer dans la mort nos âmes plus sereines.



Poème publié et mis à jour le: 15 November 2012

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