Poèmes

Pour un Seul Bien Plus de Cinq Cens Doulours

par Christine de Pisan

Amours, amours, certes tu fis pechié

De moy lier en tes perilleux las,

Ou mon cuer est si durement fichié,

Que moult souvent me convient dire helas!

Et voirement dit l'en voir

Que tu ne scés nullui si chier avoir,

Qu'il n'ait, souvent avient, de ses amours

Pour un seul bien plus de cinq cens doulours.

Au commencier m'as le cuer aluchié,

Par moy donner assés de tes soulas;

Mais quant tu l'as fermement atachié,

Adonc de ses plaisirs despouillié l'as;

Car, sans lui faire assavoir,

Trestout le bien qu'il souloit recevoir

Lui as osté, et lui rens tous les jours

Pour un seul bien plus de cinq cens doulours.

Et se cellui, par qui en dur point chié,

Ne vient briefment, mal oncques m'affulas

De tes dangiers par qui du tout dechié

De joye avoir, et s'il est d'amer las

Trop me convendra douloir;

Car plus que riens le desir a veoir,

Et, s'il ne vient, j'aray pour mes labours

Pour un seul bien plus de cinq cens doulours.



Poème publié et mis à jour le: 12 July 2017

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